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Semblantderien@orange.fr
5 octobre 2012

Lettres pour la mort.

Ceci, n’est pas un premier livre.

Ceci, n’est pas la première page d’un premier livre.

Celles-ci ne sont pas les premières lettres de la première page d’un premier livre.

Il y avait une fois, un enfant, loin dans les souvenirs des premiers temps d’avant les livres qui lisait des mots pas encore inscrits, où peut-être seulement dans le nulle part de ses pensées. Mais était-ce des pensées si aucun mot n’y était inscrit ?

Il disait des mots qui n’étaient pas des phrases, des phrases pour faire un livre, parfois même il ne prononçait que des lettres, d’autres fois encore ce n’était que des sons qui ne disaient aucune lettre, des chuintements, des mélodies, des silences, des agencements épars entre ses résonnances et celles du dehors de lui-même.

Le vertige assemblait des éléments étranges, le vertige…Du  vide qui le séparait des autres, de ce qui l’entourait, vers quoi il tendait. Seuls les cyprès verts sombres qui se tordaient au bout du ciel semblaient lui répondre : Le vent…

Le vent emportait tout et insinuait des sons dans le par-tout, il lui suffisait d’un peu d’attention pour entendre ce qui n’avait jamais été écrit, venu de loin ce jamais, d’avant les créations, les récréations : la création…

La création, en ce temps-là, ne ressemblait à rien, le rien était tout, le tout se rassemblait en cortège de sons, de lettres, de mots, puis s’éparpillait dans une spirale ascendante, une plus forte que les autres, au grès du vent, de ses tourbillons, tourbillons qui éclataient à nouveau toutes les phrases, les mots, les lettres et emportaient les sons, loin de lui : silence….

Le silence étreignait ses lèvres, le silence aux lèvres étreignait les mots, les lettres résidaient en amont, parfois en aval, la coupure dans le flux des lettres se faisait à cet endroit précis d’une bouche au sceau de la marque de l’ange : pétrifié…

Pétrifié désignait, en cette absence soudaine, en ce flux arrêté, la constance de son attention à l’endroit d’une lettre précise faisant barrage pour toutes les autres, le plus souvent une voyelle, une vois-elle, en ses yeux à elle, une voyelle bleue, couleur de la mer qu’il n’avait pourtant jamais vu en ce temps-là du rivage si éloigné d’elle. Il fermait les yeux et inventait le sable de la création, mouvant, mouvante, la présence de son corps pouvait toucher la sensation d’une trace faite dans le sable, l’impression de la trace d’une première écriture qui s’effaçait dans le flux incessant du reflux de l’écume blanche.

Si les lettres s’écrivaient alors elles s’effaçaient aussitôt, dans l’immédiat et la constance des vagues qui venaient mourir à ses pieds. Les lettres étaient une caresse à sa peau dans leurs retraits furtifs, elles n’inscrivaient rien de plus que la sensation d’être en lui…Pour leur départ, ailleurs, diluées dans l’immensité de ce qui n’avait aucune limite, en mots, en phrases, défaits par l’effet du mouvement des eaux.

 

 

Le sec et l’humide abordaient cette Frange côtière en vis-à-vis, sans délimitation stricte, le mot séparation n’existait pas, alors, dans la pensée de l’enfant ou de l’enfance, mais le mouvement incessant du sens à l’orée de sa bouche ouvrait des onomatopées, des échos, des bribes de couleurs imagées, des images bridées dans le non-sens, le vent les emportait. Puis par effet des retours elles revenaient à son auteur, à hauteur de l’enfant qui les cueillait au creux de la paume de sa main gauche. Ils les regardaient, parfois elles faisaient volume puis s’aplatissaient pour prendre une autre forme, l’enfant soufflait sur cet imaginaire, les images s’envolaient alors plus loin, aucun mot ne pouvait les rattraper.

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